La gymnastique


* Je faisais partie du club de gymnastique de Saint-Ferme, le Saint-Fermois, Notre moniteur s’appelait Monsieur Cocut. Il est devenu maire de Saint-Ferme. Nous nous entraînions le soir, sous le préau de l’école, puis plus tard, dans le bûcher, là où on entreposait le bois pour chauffer l’école. Il y  avait des filles et des garçons. On allait un peu partout, à Pellegrue, à Sauveterre, à Duras, faire des compétitions de barres fixes, de barres parallèles et des pyramides.


Le club de gymnastique « Le Saint-Fermois » en septembre 1949. Ci-dessus au premier rang de gauche à droite : n°4 Huguette Papin, n°5 Huguette Gaubert, N°6 Rocquecave, n°8 Yves Teyssou. Au deuxième rang de gauche à droite : n°1 un instituteur, n°4 Bruno Clincon, n°5 Jean Teyssou, n°7 François Clincon, n°9 Lino Clincon, n°10 Laurent Diez, n°11 avec le costume noir un moniteur, M. Brassens. Au dernier rang de gauche à droite : n°3 Charles Teyssou, n°4 un moniteur, M. Cocut, futur maire de Saint-Ferme, n°6 Papin, n°7 Pierre Soulé. 
Le club de gymnastique « Le Saint-Fermois » formant une pyramide à lʼentrainement devant lʼabbaye de Saint-Ferme en 1949. 

Le bois


* Nous n’avions pas de vignes, et il fallait bien se débrouiller pour pouvoir vivre. Alors l’hiver, on faisait du bois. On le vendait à Gonzalez, de Monségur, c’était un gars bien. Il passait avec son camion.

* Nous n’achetions pas le bois, car nous en avions un peu, principalement des chênes. On faisait le bois l’hiver pour se chauffer. Dans le bois, je ramassais les champignons. C’était mon grand dada. Je ramassais uniquement les cèpes de chêne, pas les cèpes de pins, qui sont trop visqueux.

* J’avais trois hectares de bois pour le chauffage et pour faire des piquets d’acacia pour la vigne.

Le Marché de Monségur


« Jusqu’à dix heures, c’était la ville qui achetait, après dix heures, c’étaient les revendeurs. »

* Parfois, je vendais mes produits au marché de Monségur, près de la halle. Je me mettais sous les arceaux qui allaient de l’église au photographe Marniesse. J’avais des œufs, de la graine, des volailles et des lapins. Il y en a qui vendaient aussi des pruneaux, des haricots secs … Jusqu’à dix heures, c’était la ville qui achetait, après dix heures, c’étaient les revendeurs. Ils étaient coquins, ils savaient négocier. Il y en a un, je crois qu’il était de Villeneuve, si on ne négociait pas avec lui, il prenait le lapin, il le regardait, le posait et le laissait s’échapper. Et s’il y en avait un qui vendait plus cher que nous, on lui disait : « C’est parce que tu es un couillon » !
Un « ménage » était désigné par la commune pour faire payer les places. Ils passaient devant nous et mettaient une croix sur nos paniers pour signaler que c’était payé. Plus tard, c’est la femme du garde-champêtre, Rachel Mouthe, qui passait pour faire payer.
Certains parlaient en Patois, d’autres en français, ou bien en Gavache. Sainte-Gemme, Saint-Vivien-de-Monségur, c’était le Gavache et de ce côté-ci, c’était le Patois ou le Français. Je les comprenais tous.
Vue de la place du Marché de Monségur vers 1940. Parmi les commerces situés sous les arceaux de la place, entre la Rue des Victimes du 3 août et la Rue Porte de La Réole dans les années cinquante, on peut citer le magasin Vignaux-Deschamps, l'Aquitaine, le bazar La Juliote, la marchande de chapeaux (Mme Rocher), un vendeur de jouets en bois, farces et attrapes qui vendait aussi des cacahuètes grillées (M. Tréjeau), la quincaillerie Duqueyron et le photographe Georges Marniesse.

Vue de la place du Marché de Monségur de nos jours (rebaptisée Place Robert Darniche après la seconde Guerre Mondiale). 


« Au départ, mon banc était situé en face le photographe, Georges Marniesse, puis je suis allée sous la halle. »

* Je suis née à Cambrai, dans le Nord, le 9 novembre 1921. Mon père était chirurgien-dentiste. Ma mère s’occupait des enfants. J’avais six frères et sœurs. Nous avons tous fait des études longues. Après le Certificat d’études, je suis allée au collège puis au lycée et j’ai eu le bac littéraire. Je souhaitais devenir sage-femme. En 1944, à vingt-trois ans, j’ai quitté le Nord pour aller aider mon frère qui avait un commerce de glace à Caudéran, car sa femme était malade. Je suis tombée amoureuse et je me suis mariée avec un maraîcher de Bruges, contre l’avis de mes parents. Ma famille m’a alors rejetée. Nous avons eu trois enfants.
À la fin des années soixante, nous avons quitté Bruges pour nous rapprocher de l’un de nos enfants qui travaillait à Monségur. Nous habitions place des Feuillades. La maison existe toujours. Mon mari était maraîcher et cultivait toutes sortes légumes dans le jardin, un beau jardin. Je ne me suis jamais vraiment acclimatée aux personnes de la région. On n’avait pas la même façon de voir les choses.
Mon mari faisait le gros du jardin et moi plutôt l’entretien, le désherbage … On n’utilisait pas de désherbant, on faisait tout à la main. Je tenais aussi la comptabilité, car mon mari n’avait aucune formation, uniquement le Certificat d’études. Il adorait le jardin. Moi je n’aimais pas ça.
Je vendais mes légumes aux marchés de Monségur, de Cadillac et aux Capucins à Bordeaux, trois jours par semaine. Monségur, c’était le vendredi. On vendait de tout. Tout marchait bien. Nous avions une bonne clientèle régulière. Il y avait des commerçants sous et autour de la halle, comme aujourd’hui. Ça dépassait la place. J’avais beaucoup d’amis commerçants. Au départ, mon banc était situé en face le photographe, Georges Marniesse, puis je suis allée sous la halle. Il n’y avait aucune différence entre l’intérieur et l’extérieur : même clientèle, même prix de patente. J’étais heureuse de faire les marchés. J’avais le caractère pour ça, car j’étais plutôt d’une nature joyeuse. Tout me plaisait dans le marché : le contact avec les clients, la conversation …

« Les marchandises étaient dans des cagettes ou du papier journal, posées par terre à même le sol … »

* J’allais au marché de Monségur tous les vendredis. Je n’achetais pas souvent. Je regardais les marchands, les marchandises. Il y avait de tout et beaucoup de monde. Aujourd’hui, c’est à peu près la même ambiance. Nous y vendions des volailles et des foies gras aux marchands sous la halle.

*J’allais parfois au marché de Monségur, à pied. J’y achetais ce dont on avait besoin pour manger. Il y avait de tout sous la halle, mais c’était cher. Les marchandises étaient dans des cagettes ou du papier journal, posé par terre à même le sol, un sol carrelé.

* J’allais à Monségur acheter des huîtres et de la morue tous les mardis et vendredis matin. Le mardi, j’achetais à côté de la halle. Depuis Saint-Vivien, j’y allais à vélo puis en mobylette. Si je voyais du monde au marché, je discutais un peu, mais en général, sitôt fini je revenais à la maison. Pour cuisiner la morue, je la faisais dessaler, puis bouillir avec des pommes de terre et je l’écrasais en brandade avec de l’ail et du persil.